Le Mensuel d’AGEFI Luxembourg – Edition de avril 2010
Rubrique : Domiciliation de sociétés
L’activité de domiciliation de sociétés est réglementée en droit luxembourgeois par la Loi du 31 Mai 1999, qui en réserve l’exercice à certaines professions réglementées. Certains professionnels font le choix de devenir PSF (Professionnel du Secteur Financier) et donc, d’exercer cette activité dans un cadre parfaitement réglementé et soumis à la supervision du régulateur luxembourgeois en ce secteur, la CSSF (Commission de Surveillance du Secteur Financier). Pourquoi font-ils le choix de s’enfermer dans un cadre plus rigide alors que l’activité n’est pas réglementée de la même manière selon que vous soyez PSF ou non ?

Mais tout d’abord que faut-il entendre par PSF de domiciliation ? Cette dénomination emprunt au langage courant n’a pas d’existence juridique à proprement parlée, la règlementation en vigueur issue de la loi modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier lui préférant en effet les termes de « Autres PSF » (par opposition aux entreprises d’investissement) ou de « PSF exerçant une activité connexe ou complémentaire à une activité du secteur financier ». Cela étant, et dans un souci de clarté, l’usage s’est approprié ce terme de PSF de domiciliation pour désigner l’ensemble des professionnels du secteur financier exerçant les activités de domiciliataire de sociétés (art 29 de la loi de 1993), de professionnels exerçant des services de constitution et de gestion de sociétés (art 29-5 de la loi de 1993). Des activités qui peuvent notamment se voir rajouter celles d’agents teneur de registre, d’agents de communication à la clientèle, d’agents administratifs du secteur financier.

L’agrément donné au PSF de domiciliation comme socle de qualité

Bien sûr toute activité du secteur financier ou connexe voire complémentaire à ce secteur nécessite un agrément préalable écrit du Ministre ayant dans ses attributions la CSSF pour le professionnel personne morale et le PSF de domiciliation ne déroge pas non plus à cette règle qui fait toute sa force. Ses dirigeants doivent quant à eux faire également l’objet d’un agrément préalable et écrit de la CSSF pour pouvoir exercer leur fonction au sein d’un PSF de domiciliation. Il convient de noter que le processus d’obtention de l’agrément n’est pas automatique bien au contraire. Il s’agit d’un processus long et complexe dans lequel la CSSF évalue et apprécie la qualité des actionnaires, l’honorabilité et la qualification professionnelle des dirigeants du futur PSF, ainsi que son administration centrale et son infrastructure. Ce processus constitue indéniablement un premier gage évident de sérieux pour tous professionnels souhaitant exercer une telle activité. Mais aussi vis-à-vis de tous les tiers : clients / intermédiaires / banques ou autres, souhaitant s’attacher leurs services. En effet, tout un chacun ne peut s’improviser PSF. Il faut être capable de démontrer son aptitude à accéder à la profession mais également apporter un capital minimum de 125.000 EUR, montant qui pourrait être perçu comme étant dissuasif mais qui démontre une certaine capacité financière qui se veut un argument rassurant pour les clients.

La surveillance et le contrôle continus du PSF de domiciliation sont les garants de cette qualité

Chaque PSF de domiciliation doit respecter et se conformer à l’ensemble des lois, réglementations et standards de la profession afin d’échapper aux sanctions et pertes qu’un non-respect pourrait engendrer. Un domiciliataire se doit, avant toute signature d’une convention de domiciliation et donc toute entrée en relation d’affaires avec un prospect, d’accomplir un travail de diligence sur la société à domicilier, les activités envisagées, les lieux d’exercice, les prestations de services à fournir ainsi que sur le but de la relation d’affaires envisagée par la société demandant une domiciliation.

L’exercice de la profession dit de « domiciliation » requiert donc, des collaborateurs du PSF, la connaissance et le respect des règles déontologiques applicables aux activités de ce dernier. Il appartient aux dirigeants de mettre à disposition et de tenir à jour les règles résultant des lois et réglementations internes et externes des métiers de la domiciliation. Ces règles s’expriment essentiellement dans un code de bonne conduite ainsi que dans les procédures encadrant les activités professionnelles exercées plus spécifiquement.

A cet effet, chaque dirigeant, cadre ou employé s’engage à respecter les règles reprises dans ce code dont l’objet premier est de communiquer de manière pratique la politique d’intégrité du PSF de domiciliation (Circulaire CSSF 2000/15 modifiée par la 05/177 et par la 07/307 Conformément à l’article 36-1 de la loi de 1993). La bonne application de cette politique et de ce code de bonne conduite fait partie intégrante des obligations professionnelles de chacun des collaborateurs dudit PSF. Le contrôle de ces règles s’exerce au niveau usuel du contrôle interne par : l’autocontrôle du collaborateur lui-même lors de l’accomplissement de ses tâches, le contrôle croisé entre les collaborateurs, le contrôle des dirigeants de la Société eu égard à leur responsabilité, et le contrôle de l’Audit interne. Enfin ce dernier contrôle est complété par le contrôle externe exercé par le réviseur d’entreprises et par la CSSF.

L’un des buts évident recherché ici par ces contrôles est d’encadrer de la meilleure des façons le PSF dans l’exercice de ses activités au mieux des intérêts des clients, dans le respect du cadre règlementaire en vigueur ; et de vérifier que le PSF et ses collaborateurs agissent avec toute la compétence, le soin et les diligences appropriés. Enfin la surveillance continue de la CSSF via l’ensemble des différents reportings exigés dont l’envoi se fait désormais de façon informatisé et sécurisé, permet de garder un niveau d’exigence élevé dans les différents contrôles.

Au cœur de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme

De par sa situation, le PSF de domiciliation se trouve au cœur, voire à l’origine de cette lutte et ce, dès la création d’une structure ou d’un groupe de structures. C’est pourquoi, il est vital que les contrôles s’exercent aussi et surtout dans l’optique de cette lutte régie par la circulaire CSSF 08/387 remplaçant la 05/211. Avant d’établir une relation d’affaires, chaque PSF de domiciliation se doit d’identifier les clients et de vérifier leur identité sur base de documents probants (autrement dit officiels attestant l’identité de la personne, sans oublier de renouveler cette identification), d’élargir sa connaissance sur base de toute autre information fiable et indépendante (sur ses activités, sur le but de la relation envisagée, sur la provenance économique et géographique de ses fonds), et d’identifier le(s) bénéficiaire(s) économique(s) personne physique si le client n’agit pas pour son propre compte. Le PSF de domiciliation doit dès lors prévoir des mesures de contrôle interne appropriées permettant une mise à jour de ses dossiers. Par ailleurs, il doit être en mesure de suivre de façon constante, l’activité exercée par la société domiciliée. Il s’agit là d’une obligation de vigilance dont les mesures doivent s’adapter sur base du degré de risque particulier de blanchiment et de financement du terrorisme inhérent à chaque client et ce, dès l’entrée en relation, mais également tout au long du suivi des transactions avec le client.

Il va cependant de soi que seront considérés comme clients à risque élevé : les clients originaires d’un pays ou territoire considéré comme déficient par le GAFI, le Groupe d’Action Financière (GAFI ou FATF) qui publie des déclarations mettant en lumière les lacunes des systèmes de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme de pays concernés qu’il désigne (=Pays et territoires non coopératifs (PTNC)), voir également certaines personnes politiquement exposées (PPE) résidant à l’étranger.

Sur base de tous ces éléments, le PSF de domiciliation décidera d’accepter ou non d’entrer en relation d’affaires avec le client selon un processus pré-établi d’acceptation de nouveaux clients et par la création d’un comité spécialement dédié. Bien sûr, cette lutte se manifeste également par une obligation générale de coopérer avec les autorités responsables de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme à savoir la CRF (Cellule de Renseignement Financière) et le Procureur d’Etat à Luxembourg, sans invoquer systématiquement le secret professionnel. Une coopération à double sens soit à l’initiative des autorités en question, soit de sa propre initiative et sous sa responsabilité en les informant de tout fait qui pourrait être l’indice d’un blanchiment ou d’un financement du terrorisme, ou encore une suspicion d’opération de blanchiment ou d’un financement du terrorisme.

Les obligations au secret professionnel cessent lorsque la communication d’un renseignement est autorisée ou imposée par la loi. Dans les cas de communication faite de bonne foi au Procureur d’Etat, la loi exclut toute responsabilité d’aucune sorte, et notamment disciplinaire, pour la Société et ses collaborateurs ou dirigeants. C’est pourquoi les collaborateurs et dirigeants seront spécialement attentifs à détecter tout indice de blanchiment ou de financement du terrorisme. Dans tous les cas de communication au Procureur d’Etat, le dirigeant responsable transmettra séparément et parallèlement les mêmes informations à la CSSF. Enfin, il est important de noter que les collaborateurs et dirigeants de la Société ne peuvent informer leur client ni des tiers de la transmission d’informations ni de l’existence d’une enquête. Cependant, si le client demande les motifs du refus d’exécuter l’opération, la Société peut invoquer l’instruction de blocage par le Procureur.

Un avantage indéniable pour les clients

Le choix d’un domiciliataire agréé permet à chaque client de disposer d’interlocuteurs de qualité exerçant un contrôle sérieux et renforcé sur les structures mêmes qu’il domicilie de part les obligations règlementaires de ce dernier. Du fait de la surveillance et du contrôle continue du PSF évoqué plus-avant, le domiciliataire pourra intervenir de manière plus efficace et être beaucoup plus pro-actif au regard de l’optimisation légale ou encore fiscale des structures clients domiciliées. Enfin, le client aura à sa disposition une veille règlementaire tenue par le professionnel agréé. La capacité de ses employés entrainés à suivre les évolutions légales et réglementaires et à se tenir au courant des nouveautés permet à ces professionnels de réagir promptement à tout changement législatif et d’en faire profiter ses clients. Cet outil très appréciable pour les clients, leur assure un certain confort et la garantie que leurs structures soient toujours en conformité avec la législation en vigueur. Il permet également aux professionnels d’exercer un véritable rôle actif ou pro-actif vis-à-vis de leurs clients notamment dans le cadre de l’optimisation précédemment évoquée.

Au vu de ce qui précède, on peut se demander où est l’intérêt d’être agréé PSF par la CSSF puisque les règles sont bien plus contraignantes. En fait, la réponse est très simple : s’adresser à un PSF est une garantie que ce professionnel est reconnu comme professionnel de ce secteur d’activité spécifique par la CSSF, que l’établissement surveillé garantit l’existence d’un dispositif de contrôle interne, ainsi que la mise en place de règles déontologiques, mais aussi que ces grands principes soient appliqués.

Peut-on parler de label PSF ?

L’un des aspects positif de la crise économique et financière mondiale qui a frappé sans distinction l’ensemble des acteurs est la prise de conscience accrue qui en a résulté concernant le renforcement de la règlementation financière et ce besoin croissant de surveillance et de contrôle sur l’ensemble des acteurs du secteur. La domiciliation de société n’a pas échappé à cette prise de conscience. Cela se manifeste au Luxembourg par un essor des demandes d’agréments auprès de la CSSF afin d’exercer les activités de domiciliation et de constitution de société. Pourquoi ne pourrait-on pas parler de label PSF ? Si le terme label peut faire sourire et évoquer une connotation quelque peu commerciale par certains aspects, tandis qu’un tel usage ne fait l’objet d’aucune recommandation particulière de la part de la CSSF, il n’est pas incongru, en tout état de cause, de le mettre en avant notamment pour les domiciliataires agréés, telle une vitrine. Il est important pour les clients, les intervenants et/ou intermédiaires du secteur financiers de disposer d’un référant qualitatif en la matière. En effet, il est normal qu’en échange de l’effort fait par des professionnels pour se conformer stricto sensu aux diverses obligations légales et règlementaires en vigueur, que ces derniers puissent user d’un tel référent.

Par ailleurs, le rapport d’évaluation mutuelle du Gafi sur le Luxembourg du 19 février 2010 reconnait en substance la nécessité des prestataires de services aux sociétés et fiducies d’être assujettis à la LCB/FT (Loi contre le blanchiment et le financement du terrorisme), afin d’être soumis à la surveillance d’une autorité de contrôle. Cela ne peut être que profitable à l’ensemble du secteur financier luxembourgeois qui montre par ce biais sa volonté grandissante d’agir pour plus de contrôle et de surveillance.

Alors, bien évidemment, si l’exercice de la profession de domiciliataire ne nécessite pas d’obligation de se soumettre au contrôle de la CSSF, il n’en demeure pas moins indéniable que le mouvement est en marche et que l’avenir de la profession telle que nous l’avons connue jadis est en train de changer en profondeur afin d’obtenir une reconnaissance plus grande et une légitimité accrue. Ce mouvement se confirme et s’étend à d’autres professionnels de la place comme les réviseurs d’entreprises. Il s’agit là d’un gage de qualité pour l’ensemble des clients, investisseurs, intervenants divers et variés, utiles et nécessaires dans le cadre de l’activité même de la domiciliation. Tout ceci va donc dans le bon sens et laisse entrevoir un avenir prometteur à l’ensemble des domiciliataires règlementés.

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